Journal of the European Ayurvedic Society

by Inge Wezler | 1983 | 464,936 words

The Journal of the European Ayurvedic Society (JEAS) focuses on research on Indian medicine. Submissions can include both philological and practical studies on Ayurveda and other indigenous Indian medical systems, including ethnomedicine and research into local plants and drugs. The “European Ayurvedic Society” Journal was founded in 1983 in Gronin...

Alchemy Scenes in Jain Literature

[Full title: Scenes d'alchimie dans la litterature jaina / By Nalini Balbir]

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A M. A. Rosu en hommage. Au meme titre que les autres branches du savoir, l'alchimie, au sens conventionnel du terme, a suscite l'interet des Jaina. Il y aurait beaucoup a apprendre de l'abondante litterature technique, en grande partie encore inedite, composee dans leurs cercles depuis le 13eme siecle, beaucoup a y glaner pour une meilleure connaissance de la medecine iatro-chimique, qui, a l'emploi des vegetaux, substitue celui des mineraux a des fins curatives.1 Je souhaite, pour ma part, attirer l'attention sur un certain nombre de donnees que recele la litterature narrative. L'examen devrait permettre de determiner s'il existe une alchimie jaina specifique, quels en sont les procedes et le vocabulaire, les presupposes et les buts. (I) 1. Il sera d'abord fonde sur un texte anterieur a la plupart des sastra d'origine brahmanique ou jaina, puisqu'il est insere dans la Kuvalayamala., roman en prakrit de type campu (alternance de vers et de prose) qui contient plus d'un developpement technique.2 Les informations qu'il fournit ont historiquement une valeur exceptionnelle; car on sait avec certitude qu'il est, d'un bout a l'autre, l'oeuvre d'un unique auteur Uddyotanasuri - = = * Abreviations: CDIAL R.L. TURNER, A Comparative Dictionary of the Indo-Aryan Languages, London 1966; JOSHI Damodar JOSHI, Rasasastra, Trivandrum 1986; Km. = Kuvalayamala (voir n.3); MISHRA = Siddhinandan MISHRA, Ayurvediyarasasastra (en hindi), Varanasi-Delhi 1981 (Chaukhambha Orientalia); ROY = M. ROY - B.V. SUPPARAYAPPA, Rasarnavakalpa. New Delhi 1976; t. tech. terme technique de metallurgie ou d'alchimie; ZDMG Zeitschrift der Deutschen Morgenlandischen Gesellschaft. Pour les textes, les references sont a la page et a la ligne. Un nombre suivi d'un asterisque indique un passage en vers. = = - 1 Les donnees jaina n'etaient pas connues de l'History of Chemistry in Ancient and Medieval India incorporating the History of Hindu Chemistry by Acharya Prafulla Chandra Ray, edited by P. RAY, Calcutta 1956. Quelques jalons sont poses dans J. C. SIKDAR, 'Jaina Alchemy', Indian Journal of History of Science 15,1, 1980, p.6-17, a qui l'on doit egalement l'edition et la traduction du Rasaratnasamuccaya de Manikyadevasuri (16eme s.), Jaipur 1986. 2 Expose de type astrologique (19.13 ss.); details sur le khanya-vada ou science des tresors (104.22 ss.); lecon de physiognomonie avec reference a un Samudda-sattha (129-131); exposes relatifs aux presages (183.24-184.20 et 268-269); divertissements litteraires (174.21 ss.) etc. La substantielle introduction du second volume (voir n.3) permet de reperer facilement ces passages. Etant donne la maigreur de la bibliographie consacree a ce roman, pourtant si vivant et si interessant, c'est l'occasion de signaler l'etude que Mme A. METTE consacre a la physiognomonie, telle que la Kuvalayamala. la decrit, en rapport avec les 'passions' (a paraitre dans le volume commemoratif dedie a F.R. Hamm, ed. H. Eimer, Bonn).

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et on connait avec precision sa date de redaction: 779.3 Cette date correspond a peu pres a l'epoque a laquelle on fait generalement remonter le developpement du rasa- sastra en Inde.4 Il n'est donc sans doute pas inutile de relire dans une perspective technique les pages afferentes del la KM., malgre l'essai de traduction partielle qu'en a naguere donne A.K. Warder (Indian Kavya Literature, Part IV, Delhi 1983, pp.563-565). Le decor alchimique est plante des l'abord: c'est la nuit au sommet des sauvages Monts Vindhya, dont la richesse minerale est par ailleurs souvent mentionnee.3 Paisiblement endormi aux cotes de Kuvalayamala, le prince Kuvalayacandra est bientot reveille par un feu qui brille, apparemment sans raison, dans l'interieur d'une grotte de la montagne (ekkammi Vinjha-girivara-kandaralantarammi jalanam jalamanam, 195.5). Il apercoit des silhouettes inquietantes qui s'affairent autour - 'hommes ou demons?'. Il les depeint ensuite 'pauvres heres en proie a l'emprise de la soif, qui, pareils a des demons, hantent les grottes des montagnes couvertes de forets' (195.22) et dont l'activite mysterieuse ne doit pas etre troublee. Elle pique la curiosite du prince qui, intrigue, decide, non sans s'etre arme, d'aller observer incognito 'ce que ces etres complotent'. Devant le heros, comme devant le lecteur, se deroulent alors en une succession systematique les operations qui visent a la transmutation d'un metal vil en or et montrent a l'oeuvre le metallurgiste puis l'alchimiste procedant a l'aurifaction. 2. La premiere phase, apres l'extraction proprement dite du minerai (dont le texte ne parle pas), consiste a determiner la nature du metal que contient le minerai d'apres les caracteristiques de la flamme (jalae lakkhanam). Ces enseignements, mis dans la bouche des personnages qu'observe Kuvalayacandra, pourraient provenir du livre auquel la suite montre qu'ils ont recours (cf. putthae lihiyam, 196.25). tambammi hoi ratta pita kanayammi sukkila rayae lohe kasina kamsammi nippabha hoi jalao. jai avattam davvam ta esa hoi ahiya rehilla; aha kaha vi anavatto sa cciya mauya ya vicchaya. (195.14*-15*) 'Dans le cas du cuivre, la flamme est rouge; jaune dans le cas de l'or, blanche dans le cas de l'argent. Dans le cas du fer, elle est noire et dans le cas du bronze de cloche, terne. Si la substance est en fusion, (pk. avatta = sk. avarta, avartana, t. tech.) la flamme sera puissante et brillante; si, pour une raison ou une autre, il n'y a pas fusion, elle restera faible et sans eclat.' 3 Uddyotanasuri's Kuvalayamala (A Unique Campu in Prakrit) and Ratnaprabhasuri's Kuvalayamalakatha (A Stylistic Digest of the Above in Sanskrit), Critically edited with various readings by A.N. UPADHYE, Part I Kuvalayamala, (Singhi Jain Series 45), Bombay 1959. Part II Ratnaprabhasuri's Kuvalayamalakatha, (Singhi Jain Series 46), Bombay 1970: cette refection sanskrite du milieu du 13eme s. n'apporte rien pour les passages examines ici. Elle contient la trame du recit, non les a-cotes techniques: p.195-198 (texte prakrit) *69.8-26 (texte sanskrit; le seul terme d'allure technique atteste par cette version est kalka 'electuaire'). = 4 A. ROSU, 'Mantra et Yantra dans la medecine et l'alchimie indiennes', Mantras et diagrammes rituels dans l'hindouisme, Paris 1986, p.124. 5 Voir par ex. ROY, intr. p.2. 6 Ici et plus bas on constate la tendance du verbe a l'invariabilite: hoi jalao; disai ... rasa.

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Nalini Balbir, Scenes d'alchimie dans la litterature jaina 151 Il est probable que ce type d'observation, que les metallurgistes modernes ne recuseraient pas, a du etre fondamental dans la pratique. Rares sont pourtant les textes qui le mentionnent explicitement: seul le Rasarnava (circa 12eme s.) permet une confrontation d'ou se degagent les enseignements suivants. Bien que la liste des mineraux y soit plus fournie, le bronze (sk. kamsya) n'y figure pas. La concordance de couleur est parfaite pour l'or, l'argent, et meme le fer, la difference de terminologie entre Rasarnava (tiksna) et Kuvalayamala. (loha) etant ici sans portee. En revanche, la couleur rouge attribuee a la flamme du cuivre est deconcertante: le Rasarnava, conforme a l'observation scientifique, la dit bleue (nilanibha) et ne mentionne le rouge pour aucun minerai dans ce contexte. Le texte de la Kuvalayamala. ne portant pas de variante, il faut supposer une erreur de copiste ou d'observation, ou, encore, une assimilation due a l'analogie avec la couleur du minerai brut de qualite superieure. La liste des metaux telle qu'elle figure ici n'est pas exhaustive. On n'y trouve ni l'etain, mentionne dans la suite du developpement, ni le plomb et le laiton, qu'une autre liste (§ 7 C) integre pourtant. 3. L'attention des traiteurs de minerai est attiree sur l'observation de l'action thermique (lakkheha aggi-yammam: sk. agnikarman) qui, etant 'aussi difficile a percevoir qu'il est difficile de viser la prunelle d'une figurine-cible' (raha-veha-samanam eyam dullakkhayam hoi), requiert toute leur competence. C'est que la temperature approximative de fusion permet de determiner la nature du metal: jai mauyam ta vangam, khara-jalane hoi phuttanam kanayam; mauyam vanga-vihinam ajja vi bahue na jananti. (195.18*) 'S'il (fond a feu) doux (sk. mrduka), c'est de l'etain; a haute temperature, c'est de l'or craquele. (Si le feu est) doux sans que ce soit de l'etain, aujourd'hui encore, beaucoup3 ne savent pas (ce que c'est).' L'expression phuttanam kanayam pourrait designer une variete imparfaite d'or. Dans le Rasendracudamani (XIV.11), l'adjectif sphutant figure parmi les dix caracteristiques de l'or qui n'est pas apprecie (na sasta). La deuxieme partie de la strophe semble indiquer une incertitude concernant la fusion des metaux compris entre les deux extremes determines par le premier hemistiche. 4. La strophe suivante marque la fin des operations purement metallurgiques et la bifurcation vers celles qui devraient aboutir a la transmutation. Elle definit les conditions favorables a l'incorporation de nouvelles substances dans le metal fondu (pk. vava =sk. vapa, t. tech.): jaha disai aggi-sama musa-anto kadhanta-dhaurasa jaha ya siniddha jala taha kalo hoi vavassa. (195.20*) 'Si l'on voit dans le creuset (sk. musa) que, incandescents, les minerais en fusion sont en train de bouillonner (pk. kadhanta: sk. /kvath) et que l'eclat en est limpide, c'est le moment de l'incorporation.' Rasarnava IV.49 ss. cite RAY, p.324 ou MISHRA, p.498. Bahue est curieux. Si la forme est authentique, je ne puis y voir autre chose que le nomin. plur. de tendance pronominale de bahua (sk. bahu-ka).

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La description du processus revient maintenant a la prose (195.25 ss.): 'Bien, c'est le moment de l'incorporation (esa avasaro padivavassa: sk. prativapa, t. tech. equivalent de (a)vapa'). Qu'il y soit procede. Procedons au bain du metal (dans l'eau'; nisiccau dhau-nisego: sk. niseka, t. tech.10). Tout en devisant, tous jeterent dans le creuset la combinaison de poudres (cunna-jogo). Ils ecarterent ensuite le creuset (du feu). Une fois faite l'immersion (pakkhitte nisege (?)), ils attendirent un peu: il s'etait produit du cuivre (tambayam jayam) ... 11 5. La scene de desespoir extreme auquel donne lieu ce resultat navrant montre, s'il en etait besoin, que le but de l'experience etait bien l'aurifaction. Le heros, lui-meme connaisseur en dhatuvada (cf. Kuvalayamala. 22.5*), intervient alors. Provoquant d'abord l'effroi des alchimistes ainsi decouverts, il se fait bientot connaitre comme un de leurs pairs (aham pi narindo kutuhalena sampatto, 196.2) et a recours au 'mot de passe' des inities: siddhi, siddhi, auquel repond susiddhi, susiddhi: terme banal sans doute, mais ici charge de connotations et renvoyant a la reussite alchimique aussi bien qu'au Succes final (la Delivrance) des Jaina. Apres s'etre fait longuement prier, le prince interroge les alchimistes sur les substances precises qu'ils ont utilisees pour l'incorporation et le bain. Le vocabulaire employe est le meme que precedemment, moyennant l'addition de l'expression imassa kaham pindi baddha, 'Comment avez-vous procede pour constituer la bille de metal?' (sk. pindi, t. tech.). La reponse, malheureusement allusive, ne donne aucun renseignement sur la nature des substances (imam imam ca davvam ti, 196.27). Elle satisfait toutefois Kuvalayacandra qui ne trouve rien a redire, comprend d'autant moins l'echec et suppose qu'il est du a l'intervention nefaste d'un etre surnaturel qui a subtilise la poudre au moment ou elle etait jetee dans le metal, l'empechant ainsi d'entrer en contact avec lui: c'est ce que recouvre l'expression condensee atthi avahariam tam imanam (196.28), et telle est bien en effet la cause alleguee pour expliquer l'echec d'une experience de transmutation du cuivre en or que relate le Kathasaritsagara (XXXV.82 ss.), ou celle qui aurait pu le provoquer dans un episode du Kumarapalapratibodha tout a fait comparable a notre passage, bien qu'extremement succinct12. 6. Dans ces conditions il ne reste plus a Kuvalayacandra qu'a renouveler l'operation. Cette portion du texte permet d'apercevoir clairement ce qui distingue radicalement l'operation technique sus-decrite et l'alchimie veritable. La phase clef semble concerner l'incorporation. Kuvalayacandra y procedera, tandis que la chauffe et la fonte du metal seront le lot de ses compagnons (dhamaha tubbhe, aham padivayam demi, 196.29). Alors que cette incorporation avait precedemment eu lieu au milieu d'un bavardage 9 MISHRA, p.94 10 MISHRA, p.95: les autres termes employes dans le rasasastra sont nirvapa ou snapana. 11 Ce terme sera examine en detail § 7 A. 12 Kumarapalapratibodha of Somaprabhacharya, ed. Muni Jinavijaya, (GOS 14), Baroda 1920, 367.1 ss.: pecchae dhaum dhammante dhauvaige. 'padau vasu-hara' tti jampiyam anena. tehim bhaniyam 'sagayam'ti. uvavittho tana samive kumaro. chudho tehim jogo so kumara-ppabhavena Vantarehim na avahario tti jaya kanaga-siddhi.

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Nalini Balbir, Scenes d'alchimie dans la litterature jaina 153 insouciant (§ 4), elle est ici, non seulement faite au moment propice en fonction de la particularite de la flamme (janiuna jala-visesam), mais aussi accompagnee d'un rituel: 'Le prince s'en remit a la Vertu (avalambiuna sattam), salua les Jina, associes de toutes les victoires, s'inclina devant les Siddha, prit la poudre a incorporer qu'il consacra avec la formule suivante: "Hommage aux Siddha, hommage a ceux qui ont reussi grace au Jonipahuda". Et, tout en recitant cette formule (imam ca vijjam padhantena), il jeta (la poudre) dans l'ouverture du creuset. Le creuset enflamme fut ecarte (du feu). Il fut baigne dans un bain. On attendit un instant: c'etait devenu de l'or aussi pur qu'un globe de lumiere.' (196.31-197.1) A ses compagnons ebahis (le meme terrain, la meme poudre, le meme bain. Nous avions du cuivre; tu as de l'or!') Kuvalayacandra n'a evidemment aucun mal a fournir une explication: 'Vous n'etes pas fermes dans votre foi (saddhabhisankino), vous n'avez ni mantra, ni Vertu. Tandis que moi, j'ai pris appui sur la Vertu, je me suis prosterne devant le dieu de predilection (ittha-devo), j'ai recite la formule. Voila pourquoi j'ai reussi (siddham) et vous non.' Sur leur demande, il precise que ce dieu c'est le Seigneur Omniscient (bhagavam savvannu) qui a expose l'integralite du Jonipahuda, et que le mantra, c'est le quintuple hommage (pancanamaskara). Puis le prince leur en livre le secret. Ces considerations seront reiterees lorsque, repondant aux questions de Kuvalayamala, le jeune homme expliquera pourquoi ils avaient echoue: 'Il y a d'insenses maitres alchimistes (niratthaya narinda, 197.21) qui, depourvus de Vertu, impurs, ne pratiquant pas la chastete, en proie a la cupidite, pleins de convoitise, occupes a trahir leurs amis, ingrats, n'ayant pas de dieu pour refuge, ne connaissant pas les formules, n'ayant pas de compagnon, ignorants, sans energie, denigrant leur maitre et n'ayant pas la foi, se laissent aller: "les maitres alchimistes de cet acabit qui ne connaissent pas les Ecritures et n'ont pas de Vertu, cherchent l'aumone au loin comme des malheureux vetus d'ecorce, les mauvais maitres alchimistes!". (197.24*) Ceux qui, en revanche, ont du discernement, sont energiques, pratiquent la (chastete, ont vaincu leurs sens, sont sans cupidite, sans arrogance, sans convoitise, dignes, enclins a la charite, pleins de sympathie pour leurs amis, devoues a leur maitre, honorent les dieux, sont familiers avec la recitation des mantra, ne peuvent que reussir. Et comme on dit: "Ceux qui se consacrent a la grandeur du maitre et du dieu, qui ont toutes les Vertus, voila quels maitres alchimistes peuvent changer en or meme les montagnes"." (197.27*) La lecon est assez claire: l'alchimiste n'est pas un praticien ordinaire. Comme c'est generalement le cas pour tout initie a une discipline particuliere en Inde (cf. par ex., dans le cas de l'alchimie, Rasendracudamani III.27-28), il doit etre porteur de qualites morales, avoir une conduite irreprochable, etre le disciple respectueux d'un maitre, humain ou non: l'hommage, concretise par la toute puissante formule du pancanamaskara est ici aux Jina, aux Siddha (avec probablement un double sens; § 5) et au traite specialise plus ou moins mythique du Yoniprabhrta dont nous ne connaissons le

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contenu que par des references ou des citations, mais qui pour les Jaina serait l'ouvrage de reference dans le domaine alchimico-magique. 13 Sans avoir exactement determine la cause de leur echec, les mauvais alchimistes en avaient eu le pressentiment: 'Cette combinaison (de substances) a fait ses preuves, le terrain est tout a fait favorable, le maitre (uvajjhao) est un expert, les hommes de l'art ont du savoirfaire (niuna narinda), les plantes sont pleines de seve, la conjonction est auspicieuse (sohanam laggam), des offrandes ont ete faites (dinnao balio)14. Et pourtant tout a echoue. C'est donc que nous n'avons pas de merite anterieur (natthi puvva-punno amhanam, 195.31; et 196.22 a-unna-phalam)'. Des signes physiques specifiques, souvent criteres d'ordre astrologique, sont egalement necessaires (cf. Rasendracudamani, ibidem). Des l'abord, Kuvalayacandra etait apparu comme les possedant (atthi lakkhanaim siddha-purisassa, 196.9). La strophe censee les developper est malheureusement d'allure extremement generale: 'Qui possede toutes les marques, est profond, a de la Vertu et du rayonnement, qui consomme et qui donne a sa guise, voila l'homme qui attire le succes.'15 7. La portion finale du texte n'est pas moins instructive. Elle montre Kuvalayacandra retrouvant Kuvalayamala, au comble de l'inquietude (197.12 ss.), et donne d'abord lieu a un echange entre les deux jeunes gens sur la valeur de l'enseignement alchimique. Devant la curiosite de Kuvalayamala, Kuvalayacandra s'etonne que malgre son niveau d'education (qui couvre tous les arts) elle n'ait pas appris celui-la: 'C'est qu'il n'apporte peut-etre rien. C'est seulement une theorie', repond-elle (kira ettha natthi phalam, vado ceya kevalam, 197.18). Le prince est outre: 'Il se peut que le Meru tremble, que la riviere divine coule a contre-courant: rien de ce qui a ete expose dans le Jonipahuda n'est mensonger!' (197.20*) Kuvalayacandra occupe donc la derniere partie de la nuit a impartir a Kuvalayamala la base de ce savoir. Qu'une femme soit le recipiendaire de cet enseignement est finalement peu surprenant: Kuvalayamala, qui merite la designation de yaksini (196.19), n'est pas un etre banal. Le modele femme-disciple/homme-maitre ne manquera pas de faire songer a certains textes d'inspiration tantrique ou Siva est l'instructeur de Parvati. Pour se limiter au domaine alchimique, tel est, par exemple, le cas dans le Rasarnavakalpa du Rudrayamalatantra. Pour l'heure, la lecon de Kuvalayacandra occupe neuf arya (qui pourraient bien etre issues du Jonipahuda). 13 Autre reference dans la Kuvalayamala.: 34.24*: nana-ji'uppatti-suvanna-mani-rayana-dhau-samjoyam efanojananti janiya-joni joninam pahudam anne. Voir egalement J.C. Jain, Prakrit Narrative Literature, Origin and Growth, Delhi 1981, p.148. 14 La nature des offrandes n'est pas precisee ici. Mais voir § 9. 15 jo savva-lakkhana-dharo gambhiro satta-teya-sampanno bhunjai dei jah'iccham so siddhi-bhayanam puriso (196.11*).

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Nalini Balbir, Scenes d'alchimie dans la litterature jaina 155 A. Les trois premieres distinguent trois categories d'alchimistes dont elles donnent les designations et les specialites respectives, en s'appuyant sur une explication de type etymologique (kunai/kiriya; dhau/dhamai). Cette classification n'est pas, a ma connaissance, attestee par d'autres textes. kiriya-vai narinda dhauvvai ya tinni eyaim; loe puna supasiddham dhauvvai ime savve: jo kunai joya-juttim kiriya-vai tu so bhave puriso. jo una bandhai niuno rasam pi so bhannai narindo. cojo genhiuna dhaum khettao dhamai khara-juttie so kira bhannai payadam dhauvvai jane sayale. (197.29*-31*) 'Praticiens, maitres alchimistes, metallurgistes, telles sont les trois (categories), mais on leur donne communement a toutes le nom de dhatuvadin. Celui qui procede a la combinaison des ingredients est le praticien, tandis que le maitre alchimiste est celui qui s'entend a fixer le mercure. Celui qui extrait le minerai du sol et le fait chauffer et fondre a l'aide d'un melange alcalin, voila celui que tout le monde appelle, au sens propre, metallurgiste.' Tandis que le terme de kriyavadin est limite a cette definition, les deux autres ont ete employes au cours du recit meme. Bien connu par les rasasastra en general, dhatuvadin (metallurgiste / alchimiste) a ete utilise, conformement a ce qui en est dit ici, comme terme generique (sahio sayalo dhauvvaiya-vuttanto, 197.15), et comme terme specifique, applique au groupe d'hommes lorsqu'il procedait aux operations metallurgiques proprement dites (195.22). Dans un passage precedent (191.24*-25*), qui decrivait la premiere phase de l'activite de (mauvais) metallurgistes, on les voyait, selon une technique bien connue depuis la plus haute Antiquite, faire chauffer et fondre le metal mais n'obtenir rien d'autre que de la cendre (te cciya dhamanti suiram tattha vi charo param hatthe, 191.25*)." 16 Le vocable narendra, apparemment non atteste dans les rasasastra mais connu en sanskrit pour designer un 'physician, master of charms or antidotes' (Monier Williams, s.v.), est plus souvent atteste dans le recit de la Kuvalayamala. que dhatuvadin (195.30,32; 196.2,4;197.16,22,24*). Meme si l'operation specifique dont le n. a la charge ('la fixation du mercure') n'a pas ete mentionnee comme facilitant la transmutation dans les deux experiences decrites plus haut, il semble que le sens de l'expression technique rasam bandhai (cf. sk. rasa-bandhana) ne fasse pas de doute. Globalement, narendra designe probablement le specialiste de la partie magique de l'experience. Le terme a naturellement un double sens dans la bouche de Kuvalayacandra, prince et maitre alchimiste (aham pi narindo, 196.217). B. Le detail des operations alchimiques (kiriya), auquel sont consacrees les trois strophes suivantes, est loin d'etre clair. Je ne suis pas actuellement en mesure d'en donner une traduction et me contenterai donc d'en extraire quelques elements techniques. 16 W. RAU, Metalle und Metallgerate im vedischen Indien, Wiesbaden 1974, p.26 ss.; J. SAKAMOTO-GOTO, 'Das Verbaladjektiv von dhma im Mittelindischen', Munchener Studien zur Sprachwissenschaft 44 (= Festgabe fur Karl Hoffmann, Teil 1), 1985, 171-189. 17 Cp. Sisupalavadha 2.88, cite Apte, Sanskrit Dictionary, s.v. nara.

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kiriya bahu viyappa ni-bbiya hoi paya-biya ya. addha-kiriya ya payada paao taha hoi ukkariso. sa hema-tara-bhinna duviha aha hoi sa vi du-viyappa kattha-kiriya ya padhama18 duiya sa-rasa bhave kiriya. taha vava-nisegehim davven'ekkena davva-joehim taha dhau-mula-kiriya kirai jivehi anna vi. (197.32*-198.1*) La derniere strophe condense (en une syntaxe un peu rude) les operations deja vues: avec l'incorporation de substances (une ou combinees) dans le metal en fusion et le bain de ce metal, a lieu l'operation consistant a melanger racines et mineraux. Les deux autres distinguent d'abord entre operations ou l'on n'a pas recours au germe de metal noble (ni-bbiya: sk. nir-bija) pour transmuer le metal vil, et celle ou on y a recours dans la cuisson (paya-biya: sk. paka-bija). D'apres les traites techniques, le bija est incorpore a la preparation de mercure pour augmenter sa puissance d'amalgamation.19 La situation est ici plus floue: le texte ne permet pas de savoir si la presence du mercure est requise a ce stade. Viennent ensuite les caracteristiques de la cuisson et le distinguo a faire selon que ce germe est de l'or ou de l'argent, a moins que le compose hema-tara-bhinna ne renvoie a la separation de l'or et de l'argent ('le depart') dont on connait deux modalites, l'une a sec et l'autre humide (sa-rasa ?).20 Le texte peu clair, semble d'ailleurs mal assure (voir la variante n.18). Comme c'etait le cas pour l'operation d'incorporation, les vers reprennent en partie la terminologie d'un passage en prose precedent (non moins obscur). En effet ayant appris que Kuvalayacandra etait un maitre alchimiste, les dhatuvadin l'avaient interroge sur les modalites de l'experience qu'il disait avoir deja pratiquee a Ayodhya: tehim bhaniyam 'sundaram eyam, kim atthi kinci siddham nibbiyam 21 ahava hoi rasa-baddho addha-kiriyavasiddho pao ahava viukkariso"? (196.5-6) La reponse de Kuvalayacandra, intelligible en soi mais quelque peu sybilline, avait ete: jai hoi kinci davvam honti sahaya vva niunaya kei osahi-joyau akkhara 22 ta siddham natthi sandeho (196.7*) 18 Variante: hoti sa viyappa addhakiriya padhama (Kuvalayamala. 197). 19 Definitions du terme technique bija en alchimie dans ROY, p.148; JOSHI, p.298: 'Purified gold and silver are known as Bija, these may be added to mercure for increasing its appetite or amalgamation power'; Rasendracudamani IV.93. Le Rasaratnasamuccaya qui repertorie vingt-six types de fixation (bandha) du mercure distingue entre nirbija bandha et sabija bandha: JOSHI, p.102. Une autre possibilite serait d'opposer nirbija 'impotent (gold), i.e. gold not of pure quality, unable to give rise to the production of gold from base metals' (ROY, p.144) et pakvabija (> pk. paya-biya ?), 'Ripened bija, i.e. bija combined with (essence of) other metals and minerals by heating' (ROY p.145). 20 Sur cette technique, voir par exemple J. NEEDHAM, 'Artisans et alchimistes en Chine et dans le monde hellenistique', La tradition scientifique chinoise, Paris 1974, p.139-140. 21 Lire ainsi. Ed. nivviyam. 22 Pour akkharam avec voyelle nasale breve.

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Nalini Balbir, Scenes d'alchimie dans la litterature jaina 157 'S'il y a quelque substance et quelques experts comme auxiliaires, on realise l'Imperissable (= l'or?23) grace a la combinaison des vegetaux: il n'y a pas de doute.' On ne peut manquer de noter le caractere techniquement vague du libelle (kinci davvam) et de relever l'absence de mention du mercure. L'accent semble porter sur l'alchimie vegetale, d'ailleurs connue en Inde. 24 Tout se passe comme si le prince opposait aux subtilites techniques de ses interlocuteurs une alchimie de base pour leur faire entendre, peut-etre, que ces considerations sont de peu d'importance en comparaison de la competence et de la qualite morale des hommes. C. Enfin, Kuvalayacandra donne (en une arya et demi) un echantillon de la langue des maitres alchimistes' (198.4*). Il s'agit en fait d'une enumeration des materiaux necessaires a la poursuite de leurs operations: nagam gandham suvvam ghosam taha tara-hema-tikkhai sisa-tau-tamba-kamsam ruppa-suvannai loham ca aram taha pasiddham; suyaya-kunadi ya talayam ceya naini-bhamaraiyam esa bhasa narindanam. (198.3*-4*) Les deux premieres listes de sept termes, qui donnent les noms des metaux (dhatu ou loha dans le rasasastra), se reduisent a une. On y observe en effet qu'ils sont repetes sous forme de synonymes: 1) plomb (naga/sisa), 3) cuivre (suvva: sk. sulva 25/tamba: sk. tamra), 4) bronze de cloche (ghosa: sk. ghosa/kamsa); 5) argent (tara/ruppa), 6) or (hema/suvanna) et 7) fer (tikkha: sk. tiksna 'acier'/loha). Une discordance, facilement amendable, apparait pour 2) l'etain, normalement designe par tau (sk. trapu) dans la seconde liste, mais sans correspondant dans le texte actuel de la premiere qui donne gandha (sk. gandha (ka)) 'soufre', tout a fait heterogene. Il est hors de doute qu'il faut ici retenir la variante vangam du manuscrit sur papier de Poona qui retablit la symetrie. Le soufre, qui releve de la categorie des uparasa, a pu etre insere ici, par erreur, parce qu'il est un constituant essentiel des operations alchimiques. Sa place logique aurait du etre aux cotes des autres uparasa mentionnes a la strophe suivante. Mais il est clair qu'il y a ici un flottement: en temoigne la mention, rejetee en tete de l'arya suivante, et manifestement additionnelle, de l'element ara, 'laiton'. On aboutit ainsi a la liste maximale de huit metaux, apparemment plus tardive que celle de six, connue par exemple par l'Uttaradhyayanasutra (36.73: fer, cuivre, etain, plomb, or, argent).26 23 Ou 'immortalite?' Ou les deux sens? Pk. akkhara: sk. aksara n'est apparemment pas repertorie parmi les designations de l'or, mais la relation entre or (but de l'alchimie) et l'immortalite est bien connue par ailleurs: cf. M. ELIADE, Forgerons et alchimistes, Paris 1956, p.55; etc. 24 Cf. M. ELIADE, Le yoga, Immortalite et liberte, Paris 1954, p.278-279. 25 Malgre Pischel, Grammatik der Prakrit Sprachen, § 296: 'lva = lla'. Noter en outre la forme suluvvam (196.24; v.l. suvvam) avec disjonction du groupe consonantique. 26 Les listes de l'Angavijja (ed. Muni Punyavijaya, Benares 1957, p.221, 233 et 258) mentionnent or, argent, etain, plomb et plusieurs varietes de fer.

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La classe suivante, beaucoup moins systematique, inclut le mercure (suyaya: sk. sutaka), ici mentionne sans ambiguite, et deux des uparasa, a savoir le realgar (kunadi: sk. kunati) et l'orpiment (talaya: sk. tala etc.). Les deux derniers termes sont d'interpretation plus delicate. Toutefois naini pourrait correspondre au sk. nagini (ou nagadanti), designation d'une plante qui contribue a la transmutation des metaux et a leur purification: d'apres le Rasarnavakalpa (v.463 cd), le mercure frotte avec le jus de cette plante est instantanement amalgame a une variete de fer connue, precisement, sous le nom de bhramara (= Kuvalayamala. bhamara?) et a la capacite de transmuer les metaux.2 27 (II) Sans etre aussi developpees que celle de la Kuvalayamala., d'autres scenes d'alchimie parcourent la litterature narrative jaina, et, chacune a leur maniere, renseignent sur un aspect de cette technique ou de sa conception. 8. L'une des plus anciennes et des plus precises, malgre sa brievete, figure dans la Vasudevahindi, roman jaina qui doit etre anterieur au 6eme siecle. Alsdorf, qui a edite et traduit ce passage, a montre qu'il pourrait etre la source de l'episode de Hasan et de l'orfevre dans les Mille et une nuits.2 28 A partir d'un morceau de metal (fer?) noir frotte avec du rasa (kala-loham makkhiyam rasena), jete dans les braises (chudham angaresu), chauffe et fondu a l'aide d'un soufflet (dhantam bhatthaena, t. tech.29), un ascete de type sivaite (tidandi parivvayaga) fabrique de l'or de bonne qualite (jayam pahanam suvannam) en presence du heros, Carudatta, ebloui. La suite du recit montre sans doute possible que le rasa doit etre du mercure. En effet, si le terme isole est vague, une precision permet d'emporter la decision: a Carudatta, egare et demuni, que l'experience reussie a alleche, l'alchimiste propose d'aller chercher un supplement de rasa: rasam anemu sayasahassa-vehim. Le qualificatif, mal compris par Alsdorf qui le croyait corrompu, est un terme technique, bien connu de toute la tradition alchimique et toujours applique au mercure dont il donne la capacite de transmutation (JOSHI, p.98; ROY, p.157; etc.). Un mercure satasahasravedhin (ou laksa°) est celui qui a la capacite de transmuer cent mille fois son propre poids de metal vil en or. Les puissances variant, on rencontre aussi le 30 27 naginya bhramarayasam suto grhnati tat-ksanat. Ou faut-il voir en bhamara l'equivalent du bhramarayantra, appareil mentionne par la Rasakamadhenu? 28 L. ALSDORF, 'Zwei neue Belege zur "indischen Herkunft" von 1001 Nacht', ZDMG 14, 1935, 280 ss. = Kleine Schriften, Wiesbaden 1974, p.523 ss. = Vasudevahindi, ed. Muni Caturvijaya-Punyavijaya, Bhavnagar 1930, reimpr. Ahmedabad 1989, p.146. 29 30 Sk. bhastra: TURNER, CDIAL 9424; ved. bhastra: RAU, Metalle und Metallgerate, p.26. Kl. Schr., p.524 'saya-sahassavehim (3)' et p.527, n.2: 'sayasahassavehim ist unklar, wahrscheinlich verderbt. Der Sinn muss sein: genug rasa, um Gold im Wert von Hunderttausenden herzustellen.'

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Nalini Balbir, Scenes d'alchimie dans la litterature jaina 159 mercure satavedhin ou le mercure kotivedhin. Tous ces termes sont egalement connus de la litterature jaina.31 9. Dans la seconde partie du recit les deux hommes partent a la recherche du mercure, loge dans une anfractuosite situee au fond d'un puits (rasa-kunda). Carudatta le recueille dans une coloquinte (tumba), l'alchimiste remonte la precieuse substance a l'aide d'un dispositif mecanique et disparait. Cette sequence fournit le prototype d'un scenario recurrent.32 Il est repete par exemple dans le Lilavatisara, roman du 13eme s., ou l'alchimiste sans avoir fait la preuve de son pouvoir - invoque son 'livre de recettes' pour se vanter de procurer de l'or a un jeune homme naif et pauvre, et apparait comme une figure perfide et dangereuse: 600 yogy asmi gacchami rasa-kupikam pasyaisa mama kaksayam vidyate kalpa-pustakam kupikayah paraptena rasena sata-vedhina sahasra-bharasah sulvam karisyamy asmi kancanam. (VI.163-164)33 Tout en relatant une aventure identique, 34 le chap. XIV (v.314 ss.) contient un detail remarquable. Abandonne dans le puits, le heros y retrouve un deuxieme homme car, dit le texte : na vina pum-balim hi syad rasa-siddhih kathancana. (XIV.327) Le 'sacrifice humain', necessaire a la reussite de l'operation alchimique, pourrait bien etre plus qu'un motif litteraire. Faut-il en rapprocher la coutume consistant a offrir 'des sacrifices humains aux fourneaux' qu'auraient pratiques certaines tribus indiennes?35 10. C'est a l'epoque medievale, celle ou le rasasastra a atteint son apogee, que les textes jaina mentionnent le plus systematiquement l'utilisation du mercure comme substance essentielle a l'alchimie. Ainsi, l'apprentissage du dhatuvada par Vasunanda, fils de marchand que la passion de l'alchimie conduit a sa perte, inclut la connaissance des sols et de leur odeur speciInfra; et encore Hemacandra, Trisastisalakapurusacarita (12eme s.) I.1.844: koti-vedha-raseneva tamrarasih suvarny-abhut; Jinaprabhasuri, Vividhatirthakalpa (ed. Muni Jinavijaya, Bombay 1934): 8.15*,21*; 9.3*: sahassa-vehi raso; 9.5*: raso saya-vehi; 9.8*: panca-veha; et passim le verbe vindhei au sens technique de 'transmuer'; 104.21 kodi-rasa-veha-vuttanta; B.J. SANDESARA J.P. THAKER, Lexicographical Studies in Jaina Sanskrit', Baroda 1962, s.v. kotivedhin rasa: 'a chemical preparation of mercury that possesses such magical powers as to enable one to perform the most difficult tasks' (p.123). 32 Aux passages ici examines, on ajoutera l'histoire de Somaprabha, version apabhramsa de l'Akhyanakamanikosa ed. Muni Punyavijaya, (Prakrit Text Series 5), Benares 1962, 138.8*-9*: 'Tous deux grimperent au sommet de la montagne. Ils rassemblerent differentes varietes de mineraux et de racines (samjutti dhau-muliyaham payari), les melangerent et les firent fondre jusqu'a ce qu'ils eussent l'eclat de l'or (avaropparu misivi dhamiu java dippantu suvannaum huyaum tava). 33 Jinaratna's Lilavati-sara, A Sanskrit abridgement of Jinesvara Suri's Prakrit Lilavai-kaha, ed. H.C. BHAYANI, (L.D. Series 96), Ahmedabad 1983. 34 L'alchimiste s'y nomme dhatuvadin et requiert pour l'aurifaction un laksavedhirasa. 35 M. ELIADE, Forgerons et alchimistes, p.68 ss.

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fique (vigandhimrd),36 celle du mica (abhraka), dont on sait qu'il a sa place dans certaines operations mercurielles, celle des racines (muli), mais aussi de la fixation du mercure (parada-bandha, t. tech.; Lilavatisara VI.244). 11. Ces operations sont designees par une terminologie technique qui se fait plus precise. Le demi-sloka suivant note la transmutation du metal vil (fer) en metal noble (or) par contact du mercure (sparsa-vedha, t. tech.), ce qui est l'une des modalites de transmutation repertoriees par les traites (ex. ROY, p.157): ayo 'pi hemi-bhavati sparsa-vedhi-rasan na kim? (Trisastisalakapurusacarita VII.7.334) Au contraire, une anecdote appartenant a la saga du roi Bhoja, fait allusion a la transmutation de cuivre en or par recours a la vapeur de mercure, autre methode bien connue (cf. ROY, p.157; JOSHI, p.300): pradipika-dhuma-vedhena rajnas tamra-mandika suvarni-krta. (Puratanaprabandhasamgraha 22.17)37 12. Le tableau le plus complet est celui que l'on trouve dans quelques versions jaina de la biographie de Nagarjuna l'alchimiste, toutes composees entre le 13eme et le 14eme siecles.38 Dans les libelles les plus simples, mention est faite des termes techniques designant quelques-unes des etapes (connues des specialistes sous le nom de samskara)39 qui contribuent a rendre le mercure puissant. Le but, problematique, est d'aboutir a sa fixation: svedana-mardana-jarana-maranani cakre, param sthairyam na badhnati. (Puratanaprabandhasamgraha 91.19 = Prabandhakosa 85.7-8) '(Nagarjuna) reussit l'ebullition, le broyage, l'assimilation et la mort (du mercure: rasa), mais il ne parvient pas a le fixer.' 13. L'interpretation du passage correspondant dans le Prabhavakacarita (date: 1268) souleve plusieurs difficultes, d'ordre grammatical notamment, 40 mais quatre sloka donnent un apercu general de l'activite multiforme de l'alchimiste: 36 Plutot que 'odourless earth with magical properties?', comme le propose l'editeur p.421. Aucune des deux interpretations n'est a ecarter a priori, etant donne l'ambivalence de vi. Je n'ai pas rencontre le terme ailleurs. 37 L'integralite de ce passage, difficile, meriterait une attention particuliere. Tous les prabandha sont edites par Muni Jinavijaya. Bombay: Singhi Jain Series. 38 Je ne considere ici que les versions pertinentes pour le propos alchimique. On trouvera une etude d'ensemble de ces biographies dans Ph. GRANOFF, 'Jain Biographies of Nagarjuna: Notes on the composing of a Biography in Medieval India', Monks and Magicians, Religious biographies in Asia, Oakville 1988, p.45- 66. 39 Voir, par exemple, JOSHI, p.83 ss.; MISHRA, p.211 ss. 40 Il est pourtant excessif d'ecrire, comme le fait Ph. Granoff, op.cit., n.11, que ces vers sont 'definitely corrupt'.

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Nalini Balbir, Scenes d'alchimie dans la litterature jaina girayah sarito yasya grhanganam ivabhavan dura-desantaram gehantaram bhurikaladarat, annaga-vangi-krtabhyasas tara-rangasya 2 ranga-bhuh 41 samgrahi causadhinam yo rasa-siddhi-krtam iha, yah sattvam talake pistam gandhake dravam abhrake jaranam maranam sute vetta chetta suduhsthiteh, alom sahasra-laksa-koty-amsa-dhuma-vedhan rasayanam pinda-baddhan cakaratha nadisno rasa-sadhane. (37.1*-4*) 44 'Montagnes et rivieres lui sont aussi familieres que la cour de sa propre maison. Il (va) vers une autre lointaine contree, vers une autre maison: le respect pour la moindre particule d'or le pousse 43. Ayant la pratique de la transformation du plomb et de l'etain, procedant a la coloration du metal brillant, il rassemble les vegetaux qui contribuent a la reussite du mercure. Il connait (les differentes etapes de l'experience): l'essence est broyee dans l'orpiment, la liquefaction (se fait) dans le soufre, dans le mica l'assimilation, et la mort dans le mercure. Il vient a bout de ce qui est le plus difficile (?). Il a recours a la voie du mercure, qui transmue par fumee mille, cent mille, ou dix millions de fois (son propre poids de metal vil), fixe qu'il a ete en spherules (ou: grace a une mixture, variante vida):45 tel est l'homme habile aux operations mercurielles.' 161 On retrouve, dans la succession des etapes du troisieme sloka, l'echo, en plus detaille, des quatre operations evoquees par les versions en prose de la biographie de Nagarjuna (§ 12), sattvam pistam correspondant a mardana et dravam probablement a svedana. Les mineraux necessaires a leur realisation figurent comme tels dans les traites specialises, avec toutefois des divergences selon les textes (ex. ROY, v.379, 125; JOSHI, p.99; MISHRA, p.239). 14. L'importance de la technique dans l'alchimie est incontestable. Neanmoins, la Kuvalayamala. l'a montre, on considere qu'elle ne suffit pas a garantir la reussite (§ 6). Les biographies jaina de Nagarjuna elles aussi soulignent l'obligatoire perfection religieuse et morale. Qu'on en juge. 41 Noms de metaux gloses en vieux gujarati dans l'un des manuscrits: sisu 'plomb'; taruum 'etain' (malgre TURNER, CDIAL 5992 s.v. trapu: 'OG. taruaum 'lead"). 42 La glose par suvarna est logique. Je ne connais pas d'autre occurrence de tararanga, ici naturellement favorise par la recherche de l'alliteration. Tara designe ordinairement 'l'argent', qui peut, au meme titre que l'or, constituer le but d'une experience alchimique. 43 Le sens d'or pour bhuri est atteste dans les lexiques: R. GARBE, Die indischen Mineralien, Leipzig 1882, § 9. Variante suri°. 44 Je ne vois pas d'autre solution que de donner a la forme cvi une 'valeur avoisinant celle du genitif (predicat) le plus libre' (RENOU, Grammaire sanscrite, p.151), bien qu'elle soit fort inhabituelle en pareil contexte (voir ex. § 11 et n.32). L'expression tararangasya rangabhuh n'est pas claire: est-ce une allusion a l'operation technique de la 'coloration' (ranjana; cf. Rasendracudamani IV.103; etc.)? 45 La syntaxe est pour le moins curieuse. Sur vida, t. tech., voir JOSHI, p.299.

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A) Dans les versions du Prabandhakosa (85.8 ss.; 13.30 ss.), du Puratanaprabandhasamgraha (91.20 ss.), du Prabandhacintamani (120.1 ss.) et du Vividhatirthakalpa (104.12 ss.), Nagarjuna,ne parvenant pas a fixer le mercure, consulte son maitre Padalipta qui lui indique la methode a suivre: faire broyer le rasa par une epouse parfaitement vertueuse (mahasati), pourvue de toutes les marques auspicieuses (laksana), et ce devant une image de Parsvanatha (Jina qui passe pour donner la richesse). Operant ainsi chaque nuit, Nagarjuna atteint son objectif au bout de six mois. Le lieu de l'experience, tirtha jaina celebre dans la geographie religieuse medievale, est connu sous le nom de Stambhana-pura ('ville de la fixation'). 46 B) Le Prabhavakacarita, toujours original (§ 13), ainsi qu'un passage, moins net, du Puratanaprabandhasamgraha (93.24 ss.), opposent l'alchimie ordinaire, qui requiert toutes sortes d'ingredients, et celle des Maitres yogin, dont meme les excrements sont doues de pouvoirs. Un incident eclaire Nagarjuna: alors qu'il a brise avec mepris contre une pierre un pot de verre contenant l'urine de Padalipta, le liquide, doue d'un pouvoir. de transmutation (nrjala-vedhena 37.17*), entre en contact avec le feu et la pierre devient or. La crise conduit l'eleve a prendre conscience de la vanite de son activite passee. Amaigri il partait alors au loin a la recherche du 'citraka rouge (= Plumbago Zeylanica L.), de la mundi noire (= Sphaeranthus Indicus L.), du sel de Sambar (Sakambharyas ca lavanam, 37.20*47) ou de la plante vajrakanda', toutes substances, qui, appartenant a l'arsenal des alchimistes, aident, selon les traites, a 'tuer' et fixer le mercure (ex. ROY, v.156, 185 ss.; etc.). Renoncant desormais a tous ces accessoires (rasopakaranam muktva, 37.24*), il decide de se mettre entierement au service de son maitre. 15. Un point n'est qu'exceptionnellement aborde dans les textes passes en revue: le but reel de l'alchimie. En outre, on ne voit jamais se manifester la preoccupation de longevite ou d'immortalite, qui, unie a l'aurifaction, definit, d'apres Needham,48 la veritable alchimie. Pour beaucoup des personnages rencontres dans cette etude, a commencer par ceux de la Kuvalayamala., les operations entreprises ont un objectif purement pratique: acquerir soudainement et miraculeusement une richesse qui faisait defaut. On se rappellera un episode des plus celebres et souvent illustre: celui ou le maitre Kalaka, offense, produit de l'or 'simplement en lancant une pincee de poudre dans le feu'49 et permet ainsi le financement d'une guerre contre l'infame Gardhabilla. Inversement on comprend du meme coup que la passion de Vasunanda, un fils de marchand (§ 10 ), dechaine le courroux de son entourage, et que le dhatuvada soit - 46 Exemples dans M. ELIADE, Le Yoga, p.279. 47 48 'Romaka, also called Sakambari, is the salt produced from the Sambar lake near Ajmere': RAY, p.204. J. NEEDHAM, op. cit., p.127-131. surina joga-cunna-cahumtiya-metta-pakkhevena suvanni-kauna: H. JACOBI, 'Das KalakacaryaKathanakam', ZDMG 34, 1880, 264.15-16. Le terme cahumtiya, obscur pour Jacobi (p.283, n.3) est a rapprocher du guj. cunti 'pincee'. Les vingt-neuf autres versions de la legende (commodement rassemblees dans S. Nawab, Sri Kalaka Kathasamgraha, Ahmedabad 1949) n'enseignent rien sur le procede alchimique lui-meme.

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Nalini Balbir, Scenes d'alchimie dans la litterature jaina 163 denomme vyasana 'vice' (au meme titre que le jeu, la boisson etc.):50 c'est, en somme, un moyen malhonnete de s'enrichir, en transgressant le dharma du groupe social. L'alchimie n'a pas non plus ici, au contraire du tantrisme ou du yoga, de veritable fonction soteriologique. Bien employee, elle peut, toutefois, servir la doctrine. Car si elle permet l'enrichissement, elle en permet aussi la consequence logique et necessaire aux yeux des Jaina, a savoir le don. On s'explique ainsi ce que Nagarjuna entend dire a son maitre: 'Sans reussite de l'operation mercurielle, le desir de pratiquer le don ne saurait etre comble.'51 Cette etude ne pretend aucunement a l'exhaustivite. Elle aura du moins montre qu'entre les 6eme et 14eme siecles la question de la transmutation des metaux et de son processus a beaucoup preoccupe les Jaina. Les textes de la Kuvalayamala (8eme s.) et de la Vasudevahindi (avant le 6eme s.) auront permis de souligner la place du prakrit dans l'elaboration d'une terminologie specialisee. On aura vu a l'oeuvre deux grandes categories d'alchimistes: les vagabonds, eventuellement charlatans, et les maitres jaina parmi lesquels des figures celebres (Kalaka, Devacandra le maitre de Hemacandra32, Padalipta et Nagarjuna) ou encore les princes particulierement doues et vertueux. Au vu des techniques qu'utilise l'alchimie de la litterature narrative, on ne peut, semble-t-il, conclure a l'existence d'une alchimie jaina propre. La specificite se manifeste plutot dans les objectifs ou la nature des ingredients ideologiques (pancanamaskara-mantra; role de Parsvanatha etc.). Il conviendra, ulterieurement, de s'interroger sur les rapports entre alchimie et geographie religieuse en milieu jaina etant donne les pouvoirs dont on voit investis, par exemple, les sols et les mineraux de la colline sacree de Girnar3. il pourrait bien s'agir d'une 'mode' de l'epoque medievale puisqu'on retrouve un phenomene comparable a Srisailam, au Deccan. Summary: The present paper considers alchemy in Jaina narrative literature in Prakrit and Sanskrit. I. Alchemy is dealt with at some length in the Prakrit novel Kuvalayamala (of which the exact date of composition, 779, is firmly established). The relevant pages (195-198) are analyzed (§§ 1-7). It is shown how various precise technical observations concerning metallurgy are taught (in prose and in arya verses), how they tally with what one finds in various (later) rasasatras, but how there remains some doubt about the extent to which mercury is used. On the other hand it is clear that according to the views expressed by the hero of this episode metal transmutation is possible only for those who possess the necessary moral and 50 51 Lilavatisara VI.372. Rasa-siddhim vina daneccha na puryate, Puratanaprabandhasamgraha 91.18 + Prabandhakosa 85.6. 52 Prabandhacintamani 93.20 ss.: ELIADE, Le Yoga, p.275-76. 53 Vividhatirthakalpa de Jinaprabhasuri (14eme s.) p.8-9: Ujjayantakalpa.

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spiritual qualifications: where ordinary technique is seen to fail, right faith, mantra (the pancanamaskara) and book (Jonipahuda) ensure success (§ 6). II. The second part of the paper is a perusal of allusions included in an episode of the Vasudevahindi (not later than the 6 th cent.) (§ 8) and several stories embedded in the Lilavatisara (13 th cent.) or the prabandha-literature (13 th-14 th cent.). The most famous ones concern Nagarjuna the alchemist. Though the various narratives differ widely, they show recurring motives and specialized teachings (lists of minerals, technical devices ...). It is remarkable that alchemy as such is nowhere presented as a soteriological means. On the other hand the possession of gold can be looked upon as the first step towards one of the basic virtues recommended in Jainism: generosity (dana). akkhara 7 B aggiyamma 3 abhraka 10; 13 ara 7 C avatta 2 osahi 7 B; 13 kamsa 2; 7 C kadhanta 4 kanaya 2; 3; siddhi n.12; phuttanam kanayam 3 kalka n.3 kalpa-pustaka 9 kancana 9 kiriya 7 B; 'vai 7 A; addha° 7 B; n.18 kunadi 7 C khara 7 A gandha(ka) 7 C; 13 ghosa 7 C cahumtiya n.49 citraka 14 cunna-joga 4; n.49 chara 7 A jala lakkhana 2; °visesa 6 jarana 13 Jonipahuda 6 (n.13) narinda 5; 6; 7 A Index des termes techniques (Renvois aux paragraphes ou aux notes) tala(ya) 7 C; 13 tikkha 7 C tumba 9 drava 13 dhamai 6; 7 A; 8; n.12; n.16; n.32 dhau n.12; n.13; °nisega 4; 'mula 7 B; n.32; °rasa 4; °(v)vai(ya) 7 A; n.12 padivava 4; 6 paa 7 B parada-bandha 10 pinda-baddha 13 pindi 5 putthaya 2 bali 6; pum° 9 biya n.19; nibbiya 7 B; paka° 7 B bhattha(a) 8 bhamara 7 C bhuri 13 mardana 12 marana 12; 13 mundi 14 muli 10 musa 4 yogin 9 lavana 14 loha 2; 7 C; kala° 8 vajrakanda 14 vanga 3; 7 C; 13 vava 4; 7 B vigandhimrd 10 vida 13 vindhei n.31 vedha dhuma° 11; 13; nrjala° 14; sparsa°11 vedhin koti 8; n.31; laksa n.34; sata° 8;9 vehi saya n.31; sayasahassa° 8; sahassa n.31 sulva 9 sattva 13 siddha-purisa 6 siddhi 5 sisa 7 C; sisu n.41 suvanna 7 C; 8; 11; n.13; n.32; n.42 suvva 7 C (n.25) suta 13; suyaya 7 C sthairya 12 svedana 12 hema 7 B; 7 C naini 7 C naga 7 C; 13 nisega 4; 7 B tau 7 C tamba 2; 4; 7 C taruum n.41 tamra 11 rayaa 2 rasa 8; kunda 9; "kupika 9; baddha 7 B; °sadhana 13; siddhi 9; 13; n.51; °ayana 13; upakarana 14; sa° 7 B; sparsavedhi° 11; rasam bandhai 7 A tara 7 B; 7 C; °ranga 13 ruppa 7 C

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